Commencer un nouveau projet est toujours euphorisant, la nouveauté fait habituellement cet effet-là. Le thème, les personnages, la trame, tout se trace lentement dans ma tête, j’avance dans l’inconnu le cœur joyeux. Comme le début d’une histoire d’amour, entreprendre un projet d’écriture tout neuf me donne des ailes.
Bien avant de m’asseoir devant cette fameuse page vide, ma tête se remplit tranquillement d’idées pendant que je m’adonne à mes activités quotidiennes. Je définis un personnage pendant que je lave la vaisselle, je trace la trame derrière le volant de ma voiture, je me réveille en plein cœur de la nuit, car j’ai un éclair de génie concernant une péripétie de mon histoire.
À mon avis, le fait de laisser mon esprit vagabonder ainsi pendant plusieurs jours/semaines/mois me permet d’éviter une partie de l’angoisse de la page blanche, ce malaise que les auteurs craignent, qu’ils soient novices ou expérimentés.
À l’école, je crois que les enseignants devraient tenir compte de ce besoin de placer doucement nos idées avant d’écrire. Certains annoncent le sujet attendu quelques jours avant le début du projet, d’autres font une tempête d’idées associées au thème, proposent des lectures pour s’inspirer… Ce sont tous de bons moyens qui sont essentiels au processus créatif. Il peut parfois être tentant de les escamoter, faute de temps. N’oubliez pas que ce temps bien investi permettra à vos élèves de vivre un moment d’écriture plus agréable.
Toutefois, ce processus n’est pas un vaccin contre le manque d’idées. Une fois assise devant mon ordinateur, je découvre souvent que mon personnage manque de consistance, que mon histoire est plus courte que ce que j’imaginais. C’est normal! Entre le rêve et la réalité, il faut s’adapter.
Certains jours, les mots filent sous mes doigts et le décompte de fin de journée me remplit de fierté. D’autres jours, j’ai l’impression de pédaler sur un tricycle qui roule dans la boue. Ça n’avance pas, je m’enlise, je désespère un peu. Dans ce cas, au lieu de laisser la situation miner mon moral et mon énergie, je prends une pause!
Je pars une brassée de blanc.
Je vais m’habiller (je commence souvent mes journées d’écriture en pyjama. Je sais que j’aurai éventuellement besoin de me dégourdir).
Je prépare mon thé préféré, pour me gâter et prendre soin de moi, au lieu de me taper sur la tête pour mon manque d’idées.
Je perds mon temps sur Facebook.
Je vais m’asseoir dehors, flatter mon lapin, saluer mes poules.
ET JE RETOURNE ÉCRIRE après quelques minutes. J’évite de laisser mon manuscrit lorsque je suis dans une impasse. Je termine toujours ma journée d’écriture sur une idée intéressante à poursuivre le lendemain. C’est beaucoup plus facile de s’y remettre!
Pour les élèves, c’est plus difficile d’aller s’aérer l’esprit lors d’un blocage d’écriture puisqu’ils doivent rester en classe. Voici mes suggestions :
- Écrire sur une page brouillon tout ce qui vous passe par la tête. « Blablablabla, j’ai faim, je me demande ce qu’on sert à la cafétéria ce midi, il fait beau dehors… » et, comme par magie, une idée apparaît habituellement, après quelques minutes. Ce petit truc permet de garder une attitude positive, ce qui est essentiel pour être inspiré.
- Aller aux toilettes. Lorsque j’enseignais et que je voyais qu’un de mes petits auteurs pataugeait dans un marécage imaginaire, je lui suggérais d’aller boire de l’eau. À son retour, son crayon semblait plus léger.
- Suggérer à l’enfant d’aller écrire à un autre endroit. Assis sous son pupitre, dans le corridor, à une table servant aux ateliers. Si vous êtes à l’aise d’échanger de place avec votre élève, en lui chuchotant que toutes les meilleures idées tournent autour de votre bureau, il y a de fortes chances qu’il soit le plus heureux des petits auteurs. Notez qu’il est possible que d’autres aient envie de tenter l’expérience, assurez-vous d’avoir en tête une gestion simple de la demande. Un certain nombre de minutes? Une liste d’attente?
Le plus important est de continuer d’écrire, de ne pas se laisser décourager. Tous les nœuds finissent par se dénouer quand on y met du temps et des sourires.
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